34-A – Visite en 1560 du pays de DOL par Bertrand d'Argentré

Publié le par Pierre Pétour

Visite en 1560 du pays de DOL par Bertrand d'Argenté

 

Procès-verbal de Bertrand d’Argentré, 1560

 

 

 

Avant-propos

 

Qui était Bertrand d’Argentré ?

 

Il naquit à Vitré en 1519. Son père, Pierre d’Argentré, sénéchal de Rennes de 1526 à 1548, fut l’un des rédacteurs de "La Coutume de Bretagne" (1539).

 

D’abord sénéchal de Vitré, il fut celui de Rennes en 1548 puis président du Présidial en 1552. ( Le roi Henri II avait créé en 1552 quatre Présidiaux en Bretagne : Quimper, Vannes, Nantes et Rennes. Ces tribunaux étaient intermédiaires entre les bailliages, au niveau local, et les parlements, au niveau de la province. Ils ressemblaient à nos tribunaux de grande instance).

 

Juriste reconnu, il fut chargé par les Etats de Bretagne de réviser et d’adapter "La Coutume de Bretagne" : "La Nouvelle Coutume" fut publiée en 1580.

 

Cet homme très cultivé (sa bibliothèque comptait près de 3 000 ouvrages) fut le premier historien de notre province. Défenseur de la grandeur du duché, adversaire du pouvoir royal, il publia en 1582 une "Histoire de Bretagne" qui fut saisie dès sa publication puis expurgée par une commission royale. En 1913, Barthélémy Pocquet écrivait à son sujet : « Elle relate beaucoup de faits intéressants, mais ce n’est pas une œuvre scientifique. L’auteur accepte toutes les légendes et toutes les fables, il manque absolument de critique ».

 

Bertrand d’Argentré mourut en 1590.

 

 

Pourquoi vint-il en août 1560 à Dol ?

 

Il avait été envoyé par le Parlement*, à la suite des inondations qui désolaient le Marais de Dol depuis plusieurs années. Pour établir les responsabilités de chacun, il parcourut la campagne pendant trois jours, observant l’étendue des dégâts, rencontrant les procureurs et trésoriers des paroissiens, les avocats des propriétaires, les personnes âgées pouvant témoigner, etc. A l’issue de son enquête, il ordonna les travaux nécessaires et indiqua qui devaient les financer.

 

* En 1485, le duc François II créa le Parlement de Bretagne. Jusqu’alors, les appels de justice étaient du ressort des Etats de Bretagne ou d’une commission nommée par eux. Or les Etats siégeaient fort irrégulièrement et dans différentes villes. C’est pour remédier à ces inconvénients que le duc ordonna la création de ce Parlement sédentaire, connu sous le nom de « Grands Jours » en référence aux 36 jours pendant lesquels ses membres se réunissaient.

 

En 1554, le roi de France, Henri II décréta : « N’ayant [en Bretagne] justice souveraine que d’un Parlement appelé Grands Jours qui tient [séances] 36 jours seulement, que n’est temps suffisant pour vider partie des causes et matières y ressortissantes et dévolues par appel […] créons, érigeons, ordonnons et établissons un Parlement et siège ordinaire en notre dit Pays et Duché de Bretagne […] ». Cette cour de justice intervenait en dernier appel au nom du roi. Elle était composée de quatre présidents (dont un Premier Président), un procureur général, deux avocats du roi, deux greffiers et trente-deux conseillers, elle tenait deux sessions de trois mois : l’une à Nantes, l’autre à Rennes.

 

 

Pourquoi le Marais de Dol était-il en cet état ?

 

Il nous faut dire un mot sur un personnage très important : le châtelain de Dol.

 

Dans le cas présent, châtelain ne signifie pas : seigneur, propriétaire d’un château. C’est une charge, comme il y en avait tant sous l’ancien régime, dont le titulaire était responsable du bon entretien des divers canaux, ponts et ponceaux. En relation avec les juges locaux, il devait obliger les propriétaires récalcitrants à effectuer les travaux qui leur incombaient. Plusieurs d’entre eux ne virent dans cette charge que le moyen de gagner de l’argent. Bien souvent, et encore aux XVIIe et XVIIIe siècles, ils se montrèrent très sévères à l’encontre des paysans les moins aisés mais fermèrent les yeux quand des puissants étaient en cause. 

 

D’après la déposition de Jean Gicquel, que nous lirons plus loin, depuis environ 1545, les châtelains avaient laissé les canaux s’envaser : « Il y a environ quinze ans, et depuis ce temps plusieurs fois, des châtelains, par leur avarice, et pour leur profit particulier, et au détriment d’un chacun […] ont laissé gaiser les bieds, gouttes et autres, tellement que les eaux y demeurent ».

 

L’absence de titulaire sur le siège épiscopal explique en partie les disfonctionnements dans l’administration des marais. En effet, l’évêque de Dol, François de Laval, décéda en juillet 1554, mais depuis plusieurs années déjà, la maladie le tenait éloigné de son évéché, où il était remplacé par un auxiliaire.

 

Son successeur, Jean du Mas, reçut ses bulles en avril 1557 ; il mourut en octobre de la même année, avant d’avoir été sacré. En mai 1560, il fut remplacé par Charles d’Espinay qui ne rejoignit Dol qu’en février 1566.

 

 

La visite de M. d’Argentré devait aussi permettre de nommer un nouveau châtelain.

 

C’est Pierre Franchet, sieur de l’Aumône, qui était châtelain quand M. d’Argentré y vint. Nous ver-rons au travers de diverses dépositions ce qu’on lui reprochait, à lui, mais aussi à Etienne Le Corvaisier, lieutenant de Dol.

 

Le sieur de L’Aumône avait été nommé à ce poste vers 1558 d’après les déclarations de Jean Busnel : « En l’état et office de châtelain, depuis deux ans, est immiscé N.H. Pierre Franchet ». Lequel se faisait plus précis en disant « qu’il a été l’espace de huit mois châtelain de Dol ».

 

Suspendu, il avait été remplacé quelques mois par Laurent Eon, « commis d’autorité de justice à la châtellenie dudit Dol ». Celui-ci, en demandant des travaux dans les marais, se heurta aux intérêts de certains officiers épiscopaux. Roué de coups à la sortie du tribunal de Dol, il laissa sa charge, que Franchet récupéra, sans doute d’une manière non officielle.

 

A l’issue de ses travaux, M. d’Argentré nomma Jean Gicquel, sieur de Launay, à l’office de châtelain de Dol, jusqu’à ce que la justice se prononce sur le sort de Franchet.

 

 

A propos de l’origine du texte transcrit ci-après.

 

Il y a quelques années, M. J-P Delanoue, nous avait transmis une copie manuscrite rédigée vers 1912, à la demande de M. Lemarié, sénateur, maire de Mont-Dol, président du Syndicat des Digues et Marais. Ce travail fut effectué par Me A. Buny, avoué à St Malo, et par Me G Thinault, avoué à la Cour d’appel de Rennes.

 

Comme il se doit, leur transcription était très fidèle au texte d’origine, mais peu compréhensible : des phrases très longues, avec peu de ponctuation et de nombreuses redites.

 

Nous avons pris la liberté de modifier certaines formulations, d’enlever certaines redondances. Ce tripatouillage nous semble être le prix à payer à sa diffusion. « Mea culpa, mea maxima culpa ».

 

« L’an 1560, le 25 août, Nous Bertrand d’Argentré, Conseiller du Roi, Sénéchal de Rennes, avons été requis par Me Georges Le Duc, sieur de la Marerais, économe ordonné par la Roi [pour gérer] le temporel de l’évêché de Dol durant la vacance de l’évêché [1], et Me Pierre Franchet, sieur de l’Aumône, châtelain de la ville et juridiction de Dol, à la suite de l’arrêt donné en la Cour de Parlement de Bretagne, le 20 juillet 1560, afin de nous transporter jusqu’en la ville de Dol pour être par nous procédé à la visitation, description et désignation des indigences, nécessités et réparations requises aux marais de Dol, bieds, chaussées et étangs, ce que nous leur avons accordé.

 

Puis nous serions parti de Rennes en présence desdits Le Duc, Franchet et Jehan Robinaut, greffier, notre adjoint et de Me … avocat au siège de Rennes, pour nous rendre en la ville de Dol le 26 août, en l’auditoire où s’exerce la justice ordinaire.

 

Y étaient présents ledit Robinaut, Me Jehan Garet, substitut et commis du procureur du Roi à Rennes durant la vacance dudit évêché, Etienne Le Corvaisier, lieutenant de Dol, lesdits Le Duc, Franchet et plusieurs autres ».

 

La séance commença par la lecture de l’arrêt donné par le parlement. Celui-ci indiquait que la mission de M. d’Argentré comportait deux parties : si à l’issue de ses sorties sur le terrain, et de ses entretiens avec les habitants, il devait dire comment, et aux frais de qui, seraient remis en état les marais de Dol, il devait aussi entendre Jean Simon, propriétaire dans ces marais, qui accusait l’administration de Dol (en particulier Franchet et Le Corvaisier) de concussion

 

Les trésoriers et fabriqueurs[2] des paroisses ayant des terres au marais de Dol, avaient été convoqués :

Notre-Dame de Dol[3] ; St Broladre ; Baguer-Pican ; Carfantain ; Baguer-Morvan ; l’Abbaye-près-Dol ; Lislemer ; Roz-Landrieux ; La Fresnais ; Hirel ; Le Vivier et Cherrueix avaient dépêché leurs représentants. Etaient également présents : Me Jean Busnel, procureur des paroisses de Notre-Dame de Dol et Mont Dol ; Guillaume Simon et Guillaume Buzard procureurs de St Broladre ; Jehan Gicquel procureur de Lislemer, ainsi que Tournemine, sieur de Mont Morel, se portant procureur de Delle Françoise Tournemine, dame de la Corbonnais.

 

L’avocat de Me Georges le Duc fut le premier à prendre la parole. Il rappela que ce dernier avait été nommé « à la recette et perception des fruits et revenus de l’évêché de Dol, pour les conserver au futur Evêque, Messire Charles d’Espinay, […] qui attend de jour en jour ses bulles de collation et provision apostolique, et que le dit seigneur nommé et élu Evêque a bon et notable intérêt à l’entretien des marais de Dol, et que les terres et héritages compris en l’étendue d’iceux ne soient submergés et rendus inu-tiles par le défaut de curer et de nettoyer les bieds et cours d’eaux refluant à la mer par ledit marais. »

 

L’économe demanda au commissaire de faire toute la lumière sur les devoirs des riverains des cours d’eau. Ceux-ci prétextaient, disait-il, l’obligation de l’évêque à entretenir certains ponts et canaux, pour se décharger des travaux dont ils étaient chargés. « Suppliant ledit Le Duc, qu’il ne soit fait novalité, ni préjudice aux droits du seigneur Evêque […] ; déclarant que pour le désir qu’il a du bien public et soulagement des sujets, il désire de faire non seulement ce à quoi il serait trouvé sujet, mais beaucoup davantage, pourvu que le moyen et commodité se puisse trouver de faire lesdites réparations valablement et qu’elles puissent durer. Il a dit ne pouvoir à présent [les entreprendre], vu la brièveté des jours et la proximité de l’hiver, et que l’abondance des eaux […] de l’hiver rompra et gâtera tout ce qui aurait été fait, et qu’il est averti qu’il aurait été requis de faire les réparations au mois de mai pour bien consolider et assurer la besogne, afin que les deniers qui y soient employés ne soient perdus. » Il rappelait qu’il n’occupait sa fonction que depuis un an et demi, et n’avait « encore reçu que peu de choses du revenu de l’Evêque ; les ruines étaient avenues longtemps auparavant, pourquoi est raison qu’il n’en doit porter qu’au prorata du temps que sont avenues et ont commencé les dites ruines. »

 

On entendit ensuite Guillaume de l’Etang, avocat de Jehan Busnel, le procureur de Notre-Dame de Dol et Mont Dol. Il demandait que les réparations dans le marais ne soient pas mises aux enchères, mais effectuées par les paroissiens « chacun en son endroit, lors et toutes les fois qu’il sera ordonné. »

 

L’avocat rappela que l’évêque était tenu d’entretenir le Guyoul depuis le moulin de l’archevêque jusqu’au pont du Vivier et au-delà dans la grève, ainsi que « le pont à gouffre du Bec à l’Asne ».

 

Depuis un temps immémorial, le seigneur de Dol était tenu à ces entretiens. Pourtant, alors qu’une sentence avait été donnée par la Cour de Dol pour les faire exécuter, Franchet, n’avait rien ordonné. Il en était de même pour le bied de Cardequin en Bruyère.

 

Le châtelain, gagé par l’évêque, était le responsable de la police des eaux dans les marais, disait-il. Il devait, avec la permission des juges de Dol, obliger les riverains à réaliser les travaux qui leur incom-baient. Il devait également embaucher des hommes pour assurer la part des ouvrages revenant à l’évêque.

 

Me de l’Etang mettait donc en cause le châtelain en place depuis deux ans, « noble homme Pierre Franchet, sieur de l’Aumône, lequel n’a en rien contraint ni fait faire les choses requises et nécessaires pour les marais. » Il affirmait que plus de la moitié des terres était noyée, mais pire encore, le châtelain avait participé au comblement d’un bied, en y organisant la pêche : « Et pour ce faire, a mis et fait mettre bois et grosses poutres en l’eau, tendu plusieurs rets, filets, et affermé plusieurs [personnes] à y en mettre et y prendre des anguilles. En raison de quoi le bied vers la mer est gaisé, et sont tous les pauvres habitants noyés et leurs terres perdues par lesdits défauts ».

 

L’avocat dénonçait également l’état du Guyoul qui, depuis la Planche Goudart jusqu’au pont du Vivier « était tout plein d’herbes, fanges et gaise ; [de telle sorte] qu’il était impossible à l’eau d’y courir » y compris le chenal dans la grève. « Lesquels défauts sont intervenus par faute du châtelain à qui incombe cette charge d’y pourvoir ».

 

Après avoir rappelé que l’évêque devait faire remettre en bon état « le pont Lechard, le Petit Pont et le pont de la Bégaudière, et plusieurs autres, en divers endroits », Me de l’Etang demanda que, tant que les réparations n’étaient pas faites « et que les terres des sujets sont ainsi noyées et submergées, lesdits sujets ne puissent être contraints au paiement de leurs rentes qu’ils y doivent, et en soient en paix et repos ; remontrant qu’ils en sont grandement chargés et ont à présent cédé, quitté et abandonné leurs terres et sont réduits à grande pauvreté […] ; offrant toujours de leur part, faire les réparations où ils seront sujets aux marais. Ainsi signé de l’Etang, avocat ».

 

Françoise de Tournemine, dame de la Corbonnais exposa alors ses doléances. Les eaux noyant le marais de Dol,  lui causaient de grandes pertes et dommages, à elle et à ses vassaux, « ayant plusieurs terres, hommes, fiefs, sous la juridiction de Dol, de grande valeur et estimation ».

 

Elle revint sur le rôle du châtelain : « Au dit Dol, il y a toujours eu de coutume d’y avoir un châtelain ayant charge de gouverner les eaux du marais et chemins de la seigneurie, et y mettre ordre et police, bien et dûment, et tellement que commodément on pût aller, venir par lesdits chemins […].

 

Mais depuis les quinze ans, et il y a environ dix ans et plus, il y a eu plusieurs châtelains (tels se portant et disant avoir charge dudit office) qui pour leur profit particulier et sans en rien y faire leur devoir, au contraire, ont laissé terrer les bieds et gouttes servant à l’évacuation des eaux, tomber les ponts, par leur avarice particulière, pour s’attribuer somme de deniers indûment, sans cause. Tous les marais […] sont pleins d’eau (prés et terres labourables), les ponts tombés, tellement que lesdits sujets et ayant terres perdent leurs levées et labeurs par eux faits, et leur convient presque de renoncer à leurs terres, laissant leurs maisons qui sont emplies d’eau, tellement que la demoiselle y est perdante, tant elle que ses sujets et hommes de sa paroisse, de 100 livres par an et plus. 

 

Suppliant et supplie ladite Delle, mon dit sieur le commissaire, à avoir égard [à cela], et de s’en informer, tant par descendre et voir sur les lieux, que par gens qui en pourront parler ainsi que le cas le requiert et y mettre ordre afin que les sujets ayant des biens aux marais, en puissent jouir, y aller et venir comme ils avaient de bonne coutume. […] ».

 

Jehan Gicquel, procureur de Lislemer, fit à peu près la même analyse des causes de l’inondation. Propriétaire de la métairie de Launay* « au joignant dudit marais » mais aussi de « plusieurs terres, tant en prés, pâtures, qu’héritages de grande valeur ( 80 livres par an ), au cas qu’elles ne seraient noyées, [ces] terres, prés, pâtures et héritages sont situés près et environ le bied de Cardequin. […].

 

* Peut-être L’Aunay Bégasse, dans la commune de Dol, à l’ouest de la ville.

 

 

Au gouvernement des bieds, eaux et marais, pour y mettre ordre et police, il y avait, et il y a eu de tous temps, châtelain et officiers sur les lieux, pour les tenir en bonnes réparations, […], tellement que ledit marais était bon et de bon rapport, chacun bien y habitué et jouissant du revenu des terres y étant.

 

Il y a environ quinze ans, et depuis ce temps plusieurs fois, des châtelains, par leur avarice et pour leur profit particulier, et au détriment de ceux ayant terres, juridictions et revenus au marais (mais aussi pour tout le public), n’ont fait aucun cas de vaquer à l’état de leur office. Ils ont laissé gaiser les bieds, gouttes, portes et havres, chemins et autres conduites desdits marais, tellement que les eaux y sont demeurées et demeurent ». Les terres devenues incultes sont abandonnées.

 

« Ledit Gicquel, pour son intérêt, s’en est plaint, et a présenté requête à Noble homme Pierre Franchet, se disant avoir l’office de châtelain, mais celui-ci n’y a voulu donner ordre, ainsi l’a retenue pour empêcher que l’on vaque à la plainte dudit Gicquel ». Depuis sept à huit ans, ce dernier ne peut jouir de ses terres du marais « et est perdant de 60 livres par an de revenus et plus ».

 

« Suppliant et supplie Gicquel, mon dit sieur le commissaire, de s’en informer, tant par visiter les lieux, que par gens anciens, que par lettres, extraits de papiers et par toutes autres voies y requises […] pour condamner et y faire bon ordre, afin qu’il puisse jouir de ses terres commodément et à tels dépens que de raison, le tout ainsi que sera vu de justice appartenir ».

 

 

Visite du Guyoul et de la Banche :

 

« Et tout incontinent après, en présence des susdits et autres particuliers, nous aurions été mené et conduit le long d’un canal qui descend des terres de Landal, de la Vieux Ville, et passe par le moulin de l’archevêque près le faubourg de Dol, descend à la Lavandrie […] puis au pont du Vivier, et de là, à peu de distance, au Bec à l’Asne, se rend à la mer […]. Lequel bied, les habitants appellent le bied de Guyoul ou le grand bied. Ce canal appert, en plusieurs endroits, chargé et occupé de joncs, herbes pourries et de fange, qui par la longueur du temps, s’est amassée au fond du canal par faute de l’avoir soigneusement entretenu ». Ses bords, des deux côtés, ont été endommagés par le bétail du voisinage venu s’y abreuver. Le bied traverse le marais de Pont Labat qui est à un niveau très inférieur ; en sorte que si une brèche survenait dans ses digues « il s’épandrait au travers du marais qui est plat et étendu.

 

Si, nous ont dit Busnel et plusieurs autres des assistants, le curage et l’entretien du canal […] appartient à la charge, frais et diligence de l’Evêque, depuis le moulin de l’archevêque jusqu’au pont du Vivier », ses bords sont à la charge des possesseurs des terres adjacentes, chacun en droit soi. Toutes les personnes présentes reconnurent la véracité de ces propos.

 

Le commissaire ayant remarqué que de l’eau stagnait encore dans le marais de Pont Labat, « Busnel nous a dit qu’elle était tombée du Guyoul, l’été dernier, par la faute de Franchet, lors châtelain, auquel incombait la charge de contraindre les habitants de garnir le rivage, chacun en son endroit, ce qu’il n’aurait fait. Ce que Franchet, présent, aurait contesté et nié, disant que six mois sont, qu’il aurait été suspendu de la charge de Châtelain, et un autre fut commis en son lieu, du temps duquel serait arrivé ledit inconvénient, et ne se trouvera que de son temps, il ait fait faute de ce qui était en sa charge. 

 

Poursuivant le long du canal, appert que sur icelui il y a deux ponts de bois qui servent au port et transport d’un rivage à l’autre : chacun porte sur deux sommiers. La réfection desquels ponts, les parties ont été d’accord, appartient au seigneur Evêque. Ces ponts sont en compétente réparation ».

 

Entre la Lavandrie et la mer « il y a un autre pont porté sur deux arches de pierres prenant du fond du canal. La réfection duquel [pont] on nous a dit, et ont été lesdites parties d’accord, appartenir à une chapellenie de l’hôpital, appelée la chapellenie du Haut Pont, laquelle ils nous ont dit appartenir à un prêtre servant à l’église de Saint Samson ». Le pont ayant besoin d’urgentes réparations, le chanoine responsable fut appelé à se présenter devant le commissaire.

 

« Continuant la visitation, avons vu le pont du Vivier qui est le finissement du canal. Il a certaines écluses et portes […]. Au châtelain, incombe de les faire fermer lorsque la mer monte, pour l’empêcher d’entrer dans le canal qui est d’eau douce ». Quand la mer baisse, l’eau douce accumulée peut à nouveau s’écouler dans la grève.

 

« Pour entendre et vérifier ce qu’[il en est] concernant l’effet du canal, bieds et essais qui en dépendent, avons mandé jusqu’à huit des plus vieux et anciens personnages, habitants du village du Vivier, auxquels aurions fait voir l’état du pont et écluses. Lesquels, en présence les uns des autres, et par serment,  auraient  été  d’accord  et attesté que le tout de la réfection du canal au-dessus du pont du Vivier, tirant vers la mer, appartient à l’Evêque […], lequel Evêque le fait faire par son châtelain ; le canal a besoin, depuis le pont jusqu’à une maison appelée Les Ballets, d’être vidé, curé et purgé de la vase qui s’y est assemblée par le flux de la mer, environ 2 pieds en l’endroit et au-devant du pont, et en quelques endroits 1, 2 et quelquefois 4 pieds ; ledit canal a aussi besoin d’être élargi, et ce qui en sera tiré et vidé [sera] rejeté loin des marais et curé mieux qu’il n’a été fait par le passé pour ne retomber au fond et n’être rapporté au-dedans par la mer lorsqu’elle hausse par les grandes marées, ce qu’il appert être raisonnable et naturel ».

 

De là, nous avons été conduit à un autre essai appelé le Bec à l’Asne, non loin dudit pont, à environ un trait d’arbalète, une chaussée entre les deux, laquelle est faite pour empêcher que la mer ne passe aux dites terres qui sont au-delà dans les marais, et qui sont terres […] qui se labourent chaque année, ce qu’autrement, arrivant les grandes marées, [ce] serait une grande ruine et désolation pour tous les habitants du marais […]. Néanmoins la dite chaussée est fort ruinée par-dessus, tant par le charroi qui a passé par continuation de temps, que par la mer, laquelle, quand elle est haute, échappe par des pertuis qui se font en la chaussée, au milieu de laquelle est le dit essai, lequel reçoit un autre grand canal d’eau douce appelé la Banche […], ayant environ 12 pieds d’ouverture. Les assistants ont rapporté qu’il avait une porte ferrée pendue à un essieu de fer, laquelle, lorsque la mer est retirée, s’ouvre par la force de l’eau douce qui a été retenue contre ledit huis, et au contraire se ferme par la mer lorsqu’elle monte, et l’empêche de passer sur l’eau douce, sinon quelques fois, il s’est fait quelques pertuis en la muraille de la chaussée, qui transmettent quantité d’eau de mer au canal ; ce qu’il est nécessaire de réparer.

 

Avons fait sonder la vase étant dans la Banche et dans l’entrée de l’essai (laquelle, les habitants nous ont dit être parée par-dessous, de pierres de taille) et comme journellement la mer apporte la vase, le dit conduit et passage s’est tellement comblé, qu’au-dessus du pavé et plate-forme, il y a grande quantité de vase qui empêche l’eau d’entrer dans le Guyoul […], pour aller tomber en la mer. Ce qui nous a apparu évident par le [sondage] : au-dessus du pavé et plate forme de taille étant au fond du canal, il y a environ 4 pieds de vase […]Pourquoi nous ont dit les susdits qu’il est très requis et nécessaire que la Banche soit entièrement nettoyée de la vase et terre, en sorte que le canal ait toute sa liberté d’entrer et tomber en la mer ». Aujourd’hui « l’eau douce targe dans le marais et revouge sur les terres labourables, inconvénient qui se doit éviter. De plus, il est requis que de l’autre côté dudit essai et chaussée, le canal de la mer soit un peu baissé en raison de la plate-forme de la Banche, en sorte que l’eau douce étant entrée, elle trouve cependant aise pour s’en aller et tomber en la mer, ce qui appert à l’œil être véritable.

 

Parti de là, nous sommes rentré audit marais labourable, le long du bied appelé la Banche, dont la réfection des portes, nous ont dit les assistants, appartient aux paroissiens et habitants de Mont-Dol, Cherrueix, Baguer Pican et Notre Dame de Dol, lesquels habitants sont tenus et ont de tout temps accoutumé, lorsque leur est mandé par le châtelain en prône de grande messe, de se trouver en tel nombre qu’il est requis, sur le rivage, pour curer et purger le canal en tel endroit qu’il est nécessaire. Ce qui leur incombe à raison que bonne part des habitants desdites paroisses sont situés le long dudit canal. Les terres et fruits se perdent et se conservent selon la diligence, devoir ou négligence qui se commet à la garde du canal, ce dont les susdits ont été d’accord.

 

Poursuivant outre, avons été conduit jusqu’au pont Lechard, situé au travers du canal en un endroit assez large et fort ruisseux, en nul ordre, en sorte que les habitants du pont nous ont dit qu’il leur est en fort grande incommodité pour servir les terres de part et d’autre, avec leurs harnois ou autrement ». Depuis longtemps il est en mauvais état selon les dires de Servane Thomas Taluze, Alain Colas, Olivier Chapé, Jehan Taluze, Thomasse Sebile. « Les voisins nous ont dit que le pont de bois étant au milieu […], appartient au seigneur Evêque qui doit le faire réparer et entretenir, et le parsur appartient aux habitants et détenteurs des terres adjacentes de chacun desdits côtés. Cela est notoire et ils l’ont toujours su et entendu, et avons vu qu’il est fort requis et nécessaire de promptement faire réparer lesdits bouts du pont, relever le talus et la chaussée de bonnes pierres de la hauteur dudit pont.

 

De là aurions été mené à une goutte appelée la Goutte, laquelle est pleine de vase, tellement que l’eau y est toute arrêtée et ne peut s’évacuer,  mais revouge sur ledit marais et le chemin traversant de Cherrueix à Dol, lequel chemin et fort fangeux et plein d’eau et de vase ; lesdits habitants nous ont rapporté que la goutte appartient aux habitants et aux ayant terres adjacentes, et qu’ils doivent l’entretenir, sans que l’Evêque y soit en rien sujet. L’heure de six heures venue, nous nous retirâmes en la ville de Dol.

 

 

Visite du Cardequin, du bied Jean, du bied Briand et du bied Neuf :

 

« Le lendemain 27, poursuivant la visitation des marais, en la présence des ci-devant nommés et plusieurs autres, aurions été mené et conduit jusqu’à un cours d’eau appelé le bied de Cardequin, descendant dans le grand bied de Guyoul, distant de Dol d’un quart de lieue ou environ, côtoyant ledit bied et canal jusqu’à demi quart de lieue. Nous l’avons partout trouvé être rempli, chargé et occupé de vieux herbiers, joncs et autres choses, tellement que l’eau […] n’a faculté de s’évacuer et descendre dans le Guyoul. La chaussée de chacun de ses côtés est rompue et brisée par la force de l’eau qui ne pouvait avoir son cours naturel, tellement que quand il fait grande inondation, les marais sont toujours noyés. Il n’y a personne qui y puisse habiter et à la vérité avons vu du côté tirant vers Ros et Lislemer, en divers endroits, plein d’eau qui s’y est arrêtée par faute qu’elle ne peut s’évacuer. Les assistants nous ont dit que la réfection, curage et entretien dudit bied, tant de fond que de rivage, appartient à chacun des habitants ayant terres adjacentes.

 

De là, sommes descendu jusqu’au bied de Lislemer[4], provenant des rochers sous le bourg de Ros, sur la Bruyère, tirant et descendant jusqu’au pont du Blanc Essai en la mer […]. Avons trouvé ledit bied en divers endroits rempli de fange et herbes, et l’eau qui ne peut aisément se retirer et descendre audit Blanc Essai par faute qu’il n’est entretenu et vidé des vases et herbiers y étant […].

 

Le pont de dessous le Verot traversant le bied, est en fort mauvais état, et indigent de réparations, bien que ce soit le grand chemin pour aller à Châteauneuf et Cancale ; et le bied sous ledit pont est quelque peu empêché de terres et vases ; lequel il est nécessaire de baisser quelque peu, afin que les eaux […] puissent se retirer plus facilement au pont de Blanc Essai.

 

Nous a été dit, par Franchet et quelques uns des voisins, que le Seigneur Evêque est sujet à faire réparer la moitié du pont, et l’autre moitié, le sieur de Bonnaban ; le bied étant à la charge des habitants de Lislemer et La Fresnais, chacun au prorata de ce qu’il a de terre (une acre de terre, donnant une perche[5] à entretenir) ; de quoi ont été d’accord les assistants. Et au surplus, avons vu en côtoyant le bied de Lislemer, qu’audit marais entre Lislemer et Ros, il y avait grand nombre d’eaux arrêtées là, couvrant les terres du marais, lesquelles eaux semblent y être arrêtées par faute d’avoir entretenu le bied. Néanmoins, pour mieux savoir à qui appartient l’entretien tant du pont de dessous le Verot que le bied de Lislemer et du Rosai, dont les eaux ont submergé, avons ordonné et enjoint au châtelain de faire comparoir par devant nous, au dit Dol, dix ou onze des plus vieux et anciens personnages et habitants du voisiné du bied et pont de dessous le Verot, pour être ouï et par nous enquis, desquels nous aurions rédigé l’attestation à part, hors ce procès verbal.
 

De là, descendu jusqu’à un autre bied, pont et goutte appelé le pont du Gué Briand ou le pont au prêtre. Nous l’avons trouvé tout terré et rempli de vases asséchées, et tellement qu’il appert qu’il y avait longtemps que l’eau avait cessé d’y couler par faute d’avoir été dûment entretenu. Pour mieux savoir la vérité et à qui en appartient la réfection, avons fait appeler Olivier Fauchon, Guillaume Loret, Bertrand Lechien, Jehan Bedel, voisins et proches habitants de la dite goutte. Par serment, ils nous ont dit, chacun d’eux séparément ouï, qu’il y a plus de trente ans qu’ils ont connaissance du bied, goutte et pont au prêtre descendant des marais et Rosai appartenant au Seigneur Evêque […].

 

L’eau de ce bied étant à présent arrêtée audit Rosai, s’évacuait et descendait jusqu’au pont de Blanc Essai, fors depuis sept ou huit ans que l’eau en est arrêtée et a pris son cours par ailleurs, par faute d’avoir entretenu le bied et la goutte. Avec le temps, il s’est terré comme on voit qu’il est à présent, et ils nous ont dit que la première occasion qui arrêta le cours de l’eau, a été par la faute du sieur de la Ville Brune qui a laissé se remplir et combler le bied à l’endroit de sa maison, tellement que depuis qu’il fait abondance d’eau, elle ne peut se retirer du marais, et revouge sur les terres, comme l’on voit à présent. [Les témoins] ont vu que, lorsqu’il y avait cours par le bied et la goutte, les eaux se retiraient tellement qu’il n’en demeurait audit Rosai. La réfection et l’entretien du bied et de la goutte appar-tiennent aux habitants ayant terres adjacentes au bied, de chacun des côtés, et ils y sont contraignables par les châtelains de l’Evêque, lorsqu’ils en sont avertis.

 

De là avons été conduit à un autre bied, goutte et pont appelé le bied Neuf et le Petit Pont. Avons trouvé le bied tout plein d’eau jusqu’au haut du rivage : fange, vases et herbes, et l’eau arrêtée tellement qu’elle ne pouvait se retirer et évacuer dans ledit grand bied. Les assistants nous ont dit que l’eau avait été ainsi arrêtée par un appelé Burgot en l’endroit de ses terres, au-dessus dudit pont […]. Avons ordonné au dit Le Duc et au châtelain de faire intimer à comparoir Burgot devant nous à Dol pour être ouï.

 

De là, nous nous serions retiré à Dol, les six heures du soir étant survenues […].

 

 

Visite du bied de Launai, et de divers affluents de la Banche :

 

Le lendemain, vendredi 28e dudit mois, […] environ les sept heures, en la présence de Robinaut, Le Corvaisier lieutenant de Dol, Garet substitut du procureur du Roi, le Duc, Franchet et autres ci-devant nommés, serions descendu jusqu’au bied et goutte appelé Launai*, descendant du terrain et s’évacuant dans la Banche, laquelle goutte avons trouvée toute gaisée et remplie de fange et l’eau tout au plein du bied ; elle n’a moyen de s’évacuer et couvre toutes les terres jusqu’à plus d’une demi-lieue à l’entour. Les chemins de tous côtés descendant de Cherrueix et St Broladre à Dol sont pleins d’eau et de fange, tellement qu’il est impossible d’y passer à pied et à cheval. Les bords du bied sont en plusieurs endroits rompus et brisés, les terres demeurées inutiles et les maisons inhabitables. Guillemette Meslier, veuve de défunt Michel Roussel demeurant près et au joignant de ladite goutte, nous a dit qu’il y avait plus de cinq à six ans qu’elle n’avait pu jouir des levées desdites terres, à raison de la grande inondation. A la vérité, avons vu que ledit pays, quartier et environs de la goutte et haye, avait été naguère tout couvert et rempli d’eau, et lesdites eaux y sont arrêtées par faute d’avoir curé, vidé et entretenu le bied, des herbes et vases dont il est tout couvert et rempli.

 

* Le bied de Launai pourrait être la Haye de Quercou.

 

 

De là, nous fûmes conduit au pont Dom Roux et bied descendant dans la Banche, lequel pont Dom Roux avons trouvé en pareil, tout envasé et rempli de terre et fange, et le rivage rompu et brisé en divers endroits. Avons vu que l’eau y était toute arrêtée et plus haute du côté vers le Bec à l’Asne que du côté vers la goutte de Launai, et même, avons vu le bied de la Banche tout vasé et rempli d’herbiers et fange tellement que l’eau ne se peut évacuer et est contrainte de prendre son cours par-dessus le rivage de chaque côté, et descendre aux terres et chemins adjacents dudit bied : les chemins sont couverts et pleins d’eau et il est fort difficile d’y pouvoir passer. Pour entendre la vérité […] avons fait venir Thomas Marc de Pinay (45 ans), Pierre Tougard (40 ans), Julien Taillandier (38 ans) proches voisins du pont et bied. Par serment, l’un après l’autre interrogé, nous ont rapporté que de tout temps de leurs vies, ils ont connaissance desdites gouttes, proches du pont Dom Roux […] ; gouttes, ponts, bieds du marais sont en tous endroits pleins de vases et herbiers jusqu’au rivage, et les gouttes et ponts tant vasés et bouchés que l’eau qui descend vers le Marais, tant des moulins de Launai Baudouin, du terrain des moulins des Homeaux et du bourg de St Broladre, qu’autres lieux, ne se peut évacuer et retirer comme elle avait coutume de faire […]. Les eaux ont tant submergé et revougé sur les terres, qu’il y a plus de six ans qu’ils n’ont joui de leurs terres et sont contraints de les quitter et abandonner et s’en aller demeurer ailleurs. En outre, nous ont rapporté qu’il y a plus de quatre à cinq ans que les grands chemins anciens, traversant les marais pour aller à la ville de Dol au pont du Billais sont tous pleins et couverts d’eaux, [de sorte] qu’on n’y peut passer. A la vérité, avons vu que les terres du marais depuis Dol jusqu’au pont du Billais, de tous côtés, sont submergées […], plusieurs maisons sont inhabitables et les habitants nous ont rapporté que les eaux sont ainsi arrêtées par faute d’avoir dûment curé et entretenu les bieds.

 

Les habitants ayant terres aux marais sont sujets à entretenir les bieds, gouttes et ponts à leur dépens, tant du fond, curage que rivage, ce qu’ils ne peuvent faire tant que le grand bied et canal dessus le Bec à l’Asne entrant en la mer, n’ait été vidé, curé et baissé par le devant ; la réparation duquel appartient au seigneur Evêque. Le bied baissant devant le Bec à l’Asne de 5 à 6 pieds et les bieds et gouttes du marais étant curés, l’eau pourrait aisément s’en aller, et les habitants jouir de leurs terres. A la vérité, les assistants nous ont dit être d’accord que si le bied de Bec à l’Asne avait été quelque peu baissé, les eaux pourraient facilement se retirer.

 

De là avons été mené par le châtelain le long du bied de la Banche et [l’avons] côtoyé environ une grande lieue, lequel avons en tous endroits trouvé rempli de vases et herbiers, et l’eau y étant jusqu’au rivage en divers endroits de chacun des côtés, fort mal entretenu, tout cassé et rompu, et l’eau, par lesdits endroits, submergeant et entrant dans les chemins et terres des environs. Côtoyant [le bied], avons pareillement vu les essais près de la maison des Pommiers, l’essai des Barillières, l’essai près de la maison des Ingans, descendant et s’évacuant dans la Banche, tous pleins de vases et herbiers par faute d’avoir été curés. Arrivé au bied de l’Ebilliais, l’avons trouvé en pareil [état] que les autres, plein d’herbiers et vases, commençant près de la maison des Ingans et descendant dans la goutte Guyon qui tombe dans la Banche, et y est l’eau fort arrêtée par faute d’avoir été curé comme nous l’avons vu.

 

Poursuivant la visitation, avons été conduit à l’autre bied et goutte appelée la Goutte Potin, où descend et passe le bied venant de St Broladre, appelé le bied et douve du Jonchai, auquel nous a été rapporté par lesdits assistants que les eaux venant de St Broladre, St Marcan, Ros sur Couesnon s’évacuent ; avons trouvé le bied du Jonchai et la Goutte Potin fort vasés et remplis de bourriers pourris, joncs et autres qui arrêtent les eaux qui ne peuvent descendre aux grands bieds comme ils avaient coutume. Ledit canal et rivage des gouttes est cassé et rompu, faute d’avoir été entretenu ; et l’eau a couvert et gâté grand nombre de terres de chacun des côtés, et par succession de temps pourra couvrir et perdre le reste des marais s’il n’y est pourvu.

 

 

Retour à l’auditoire de Dol :

 

Le lendemain, 29 dudit mois, avons fait appeler devant nous lesdits le Duc, Garet, Franchet et parti-culiers ci-devant. [A cette] évocation comparurent Me Jean Busnel pour les paroissiens de Notre Dame de Dol, Mont Dol et de la dame de la Corbonnais ; Guillaume Buzard, pour les paroissiens de St Broladre ; Jean Gicquel pour ceux de Lislemer, et en son privé nom ; Jean de Rouville, sieur de St Roncé, en son privé nom ».

 

Les paroisses de Baguer-Pican, Carfantain, Baguer-Morvan, l’Abbaye-près-Dol, Roz-Landrieux, la Fresnais, Hirel et Le Vivier n’étant pas représentées, le commissaire leur fit envoyer une nouvelle demande à comparaître « pour dire et débattre leurs intérêts à la réparation et réfection des bieds du marais, et se voir condamner à contribuer à la réparation et réfection des bieds, banches et gouttes, chacun en droit soi, comme de tous temps ils l’ont été ; même frayer et contribuer aux frais, tant de la visitation faite pour le besoin public que de la réfection ».

 

Présents et absents furent convoqués à Rennes, en l’auditoire royale, pour le 10 Septembre.

 

 

Publication de l’adjudication de travaux dans les marais (pièce jointe) :

 

« Gilles Joucquan, sergent de la Cour de Dol, j’ai banni, à haute et intelligible voix, ce jour de samedi, marché à Dol, au bout de la poissonnerie, lieu et heure accoutumés à faire tels exploits, que les réparations et choses ci-après étaient […], entre autres choses, depuis le pont du Vivier jusqu’au Bec à l’Asne » curer et approfondir de 4 pieds ; et depuis le Bec à l’Asne jusqu’à la maison des Ballets de 6 pieds ; « ôter la vase molée étant aux deux orées du bied, et mettre la curure assez loin, de sorte que la mer ne puisse ramener lesdites vases et molées du bied […].

La baillée desdites choses se fera le mardi 23 juillet en l’auditoire de Dol, à éteinte de chandelle, à qui pour moins, en entier les voudront faire […]. »

 

Cette publication fut faite le samedi 13 juillet en présence de Laurent Eon, alors châtelain de Dol, de Julien de Launay et de Guillaume Symon, et le texte fut affiché « au lieu le plus apparent ».

 

 

Assignation faite aux différentes paroisses (pièce jointe) :

 

« En vertu de la commission qui m’a été adressée par M. le Sénéchal de Rennes, j’ai signifié aux paroissiens du Vivier, assemblés en corps politique qu’ils aient à faire trouver deux ou trois des principaux de la paroisse, avec mémoires, instructions et pouvoirs suffisants par devant M. le Sénéchal, en l’auditoire de la Cour de Dol, des indigences et nécessaires réparations qui seront trouvées devoir être faites aux marais dudit Dol, au 22e jour du présent mois, à une heure de l’après-midi, afin […] d’en faire devis et bail, soit à la journée soit à la traverse, si besoin est, et se voir condamner à la contribution dudit œuvre, autant qu’ils y seront tenus, avec intimation que s’ils y font défaut, il sera néanmoins procédé comme de raison sera vu appartenir. Fait savoir ce que dessus aux habitants de ladite paroisse en parlant à Jehan Delépine, Jean Lemarié, Julien Talvat, Guillaume Talvat, Guillaume Delépine, auxquels j’ai laissé autant* de mon présent exploit et de ladite commission. « Signé Pierre Chapelle, sergent de la Cour de Dol ».

 

* Un autant : une copie.

 

Pareille assignation fut faite aux paroissiens de Roz-Landrieux par Tremial, auprès de Julien Fauchon et Colas Ory, trésoriers en charge ; à ceux de Lislemer par de Laroche, auprès de Bertrand Le Bigot, Jehan Landry et autres ; à ceux de Baguer-Pican par Fouesnel, auprès de Noël Ginguené, Jehan Rondin et autres ; à ceux de Cherrueix par Malaire.

 

Seuls, les paroissiens de Carfantain ne sont plus obligés de se rendre à Rennes (pièce jointe) :

« Rapporté par moi, sergent soussigné, qu’à la requête de Pierre Franchet et Me Georges le Duc […], j’ai ajourné les manants, habitants et trésoriers de la paroisse de Carfantain comparoir à Rennes au 10e jour de septembre prochain devant M. le Sénéchal dudit Rennes, pour recevoir règlement sur le procès verbal pour la visitation des marais de Dol […].

 

Signifié auxdits paroissiens à l’issue de la grande messe dominicale dite le 1er jour de septembre 1560, en présence de Pierre Surlesve, Pierre Margrite et plusieurs autres. Ai laissé autant de mon présent exploit à Michel Herbert, l’un des trésoriers de Carfantain pour servir à tous les autres paroissiens, ce dimanche 1er septembre 1560. « Signé G. Rogier ».

 

« Rapporté par moi, Guillaume Le Trésorier, sergent, qu’à la requête de Pierre Franchet et Georges Le Duc, assignation [a été] donnée aux paroissiens de l’Abbaye près Dol à comparoir le 10 septembre, au lieu signifié ci-devant, en parlant à Laurent Leprince etc., trésoriers de ladite paroisse ; Idem à ceux de La Fresnais par Le Chien, en parlant à Jehan le Mur, l’un des trésoriers et en présence de Pierre Simon et Guillaume Simon le jeune ; à ceux de Baguer Morvan par Carrière, en parlant à Julien Pigeart, Julien le Grand, trésoriers de la paroisse ; à ceux de Roslandrieux ; à ceux d’Hirel par Guedé, en présence de Jean Rouesnel et Etienne Rouesnel ; à ceux du Vivier par G. Cherpin en présence de Jehan Josset, Etienne Bouesnel ; à ceux de Baguer Pican par J. Fouesnel, en présence de Julien Doucet et autres, donné autant et copie en parlant à petit Jean Harel, trésorier.

 

Tous les exploits donnés en vertu de l’ordonnance ».

 

 

Auditoire de Rennes, le 10 septembre :

 

Ledit jour 10e septembre, serions entré au dit auditoire de Rennes, auquel lieu […] le procureur du Roi a fait évocation des parties. A icelle évocation auraient comparu : Me Pierre Boudet procureur des paroissiens et trésoriers de Notre Dame de Dol, Mont Dol, Cherrueix, le Vivier et Hirel, et aussi procureur de Guillaume Nogues  et de noble homme Laurent Eon ayant été commis d’autorité de justice au fait de la châtellenie dudit Dol ; Me Georges le Duc, Sieur de la Marerais, commis pour l’économe de l’Evêché de Dol ; Me Pierre Franchet, sieur de l’Aumône, à présent châtelain dudit Dol ; Me René Even, procureur des paroissiens de Roslandrieux ; de Colas Ory et Julien Fantou, trésoriers d’icelle ; Me Rolland Bouestard, procureur des manants et habitants de l’Abbaye près Dol ; Me Pierre Huart, procureur des paroissiens de St Broladre ; Me Jehan Jacopin, procureur de noble homme René du Han, sieur de la Mettrie du Han ; Me Jan Simon présent et Boudet son procureur ; Me Jehan Gicquel, sieur de Launay, aussi présent pour son intérêt, et procureur de Françoise de Tournemine. A chacun aurions ordonné de rédiger par écrit leurs dires et déclarations, et de les bailler audit Robinaut, notre adjoint, pour être employés en notre procès verbal, ce qu’ils auraient fait et desquels la teneur suit.

 

 

Plaidoirie de Me Boudet :


Me Boudet a dit et remontré pour les trésoriers et paroissiens de Notre Dame de Dol, Mont Dol, Cherrueix, le Vivier et Hirel que noble homme Laurent Eon a été commis d’autorité de justice au fait de la châtellenie de Dol, car depuis les cinq ou six ans derniers, le temporel de l’Evêché de Dol est vacant, saisi en la main du Roi, régi et gouverné par les officiers, économes et administrateurs.

 

Le seigneur Evêque doit entre autres choses, faire évacuer les eaux à la mer, de sorte que les parois-siens et chacun, puissent aisément et commodément jouir de leurs maisons, terres et héritages situés aux dits marais […]. Pour y mettre ordre, il faut curer et dégaiser le Guyoul, audit fond, de plus de 3 pieds ; le bied du Vivier, depuis le pont jusqu’au gouffre du Bec à l’Asne, de plus de 6 pieds ; puis du gouffre jusqu’à la mer de plus de 8 pieds, et les mettre en leur ancienne largeur. En outre, l’évêque doit l’entretien du Bied Neuf ainsi que la chaussée du Vivier depuis le pont du Vivier jusqu’au village de La Laronnière, le pont Lechard, le pont à l’Eturel, le pont de la Bégaudière, les ponts et gouffres du Vivier et Bec à l’Asne, le Pont Neuf, le pont Limier, le bied du Rosai en Lislemer pour une moitié … , la goutte du Rocher,  le fond et l’entretien du Cardequin jusqu’à la Bruyère, le fond du bied de la Bruyère au pont de l’Eturel, les perches de Lislemer (pour les prés Bouviers et autres terres) et le bied de Roblin.

 

En outre, doit à ses gages et dépens un châtelain qui ait soin et œil au fait du Marais, et dont la charge est de contraindre et faire contraindre les manants et habitants du marais ayant terres et héritages, de faire le parsur des réparations des banches, ponts, passages, gouttes et essais du marais, autant que chacun en doit […], et que commandement leur en sera dûment fait. En cas de refus, le châtelain a son recours en la Cour dudit Dol, et lui est baillé puissance de contraindre lesdits sujets ».

 

Selon Me Boudet, les habitants se plaignent que les officiers et administrateurs du temporel de l’évê-ché aient si peu agi depuis six ans pour prévenir les inondations qui leur font perdre beaucoup d’argent chaque année : 20 000 L de revenus aux paroissiens de Cherrueix et de Mont Dol,  4 000 L à ceux de Notre Dame de Dol, et 1 000 L à ceux du Vivier et de Hirel.

 

« Néanmoins les commis et receveurs à la recette de Dol contraignent rigoureusement, de jour et heure, les paroissiens et chacun des sujets de Dol, de payer les rentes et devoirs qui sont prétendus être dus à l’occasion des héritages noyés aux dits marais, nonobstant que nullement ils n’en jouissent, par défaut du dit seigneur, économe et administrateurs jouissant dudit Evêché, et de Franchet.

 

Et encore, sous prétexte de justice et monopole, lesdits receveurs et commis ont fait et font un grand nombre de concussions et usurpations sur chacun des paroissiens, et entre autres, un nommé Me Olivier Le Corvaisier, se portant receveur de Dol, qui les fait exécuter par un nommé Cohue et par d’autres sergents de Dol, lesquels n’ont aucuns biens et sont le plus souvent des avoués dudit receveur. Partant, on ne peut avoir recours des biens dont sont saisis lesdits sergents,ils en jouissent et font profit par moyen dudit monopole entre eux et Le Corvaisier. Si lesdits exécutés se rendent opposants [lors de la saisie] et veulent donner deniers ou biens meublés pour éviter des frais, et s’ils font requête auxdits sergents de montrer leurs commissions, en vertu de quoi ils font l’exécution, ils en sont en refus et il n’en est rien rapporté par les sergents afin de parvenir à leurs usurpations. Indûment ils se saisissent de leurs bêtes et avoirs, s’ils en trouvent, ou de grand nombre de leurs biens meubles, de tout quoi font vente sans avoir égard à ce que devant, et mettent entre leurs mains les deniers qui souvent sont plus élevés de deux, trois ou quatre fois que la dette, sans jamais rien rendre aux pauvres gens exécutés, lesquels n’ont puissance ni hardiesse de poursuivre.

 

Ils font vente des biens et du bétail saisis, aux lieux non députés à cet effet, à personnes étrangères et inconnues par eux […], à gens de mauvaise conversation. Ils les mettent à haut prix en pension […] fors qu’ils ne doutent que l’exécuté ait volonté, puissance et moyen de poursuivre son droit, et en font métier pour couvrir sous l’ombre de justice, leurs concussions […].

Le Corvaisier et ses sergents intimident tellement les pauvres gens et chacun, tant à cause de la grande longueur des procès où il les tient, qu’aux offenses, batteries, meurtrissures, malversations et menaces qu’il leur a faites et fait faire, qu’à la grande faveur qu’il a en la Cour de Dol, à cause de ses parents et alliés qui en sont officiers, et les seigneurs avec lesquels Le Corvaisier a charge et recette. […]. Il fait constituer prisonnier, chacun des pauvres gens, et en fait charte privée, disant le faire comme receveur des deniers, nonobstant qu’ils n’y sont en rien sujets et ne jouissent en rien des biens appartenant à l’église, ni autres choses […]. Et lorsque quelqu’un s’avance de vouloir plaidoyer, Le Corvaisier dit la connaissance n’en appartenir aux juges de Bretagne, et les pauvres gens se voyant ainsi destitués et dépossédés de leurs biens, et entendant les grandes menaces et entreprises de Le Corvaisier, afin d’avoir liberté, ils aiment mieux lui laisser leurs biens et s’accorder avec lui, que d’aller soutenir leurs droits en autre lieu qu’en Bretagne ; d’autant qu’ils n’ont moyens ni biens pour ce faire. Et par ces moyens, il s’est fait payer des rentes et devoirs qu’il prétend être dus au sieur Evêque par les paroissiens et s’est enrichi du bien dudit public et de plus de 10 000 L […].

 

Ledit seigneur de Dol a devoir de taux en grains, prétendu lui être dû, tant au marais qu’ailleurs, qui font plus de 10 000 boisseaux qu’il fait payer chaque année. Ce taux est cause de la perdition et de l’abîme des terres du marais. Quand l’eau, en été, s’est quelque peu retirée, ils labourent mais en raison des eaux qui y arrivent et qui n’ont voies à courir à la mer par le défaut du seigneur Evêque, ils perdent leurs labeurs, semences et compost qu’ils ont mis aux dits héritages […]. Ledit taux, par les officiers de Dol, est mis au haut et excessif prix, et les pauvres gens sont contraints de payer les rentes que le seigneur Evêque prétend contre eux, au prix et taux dudit Dol, alors que si l’on jouissait du marais comme de coutume, [la récolte] serait plus grande et le taux à plus bas prix, et par conséquent ils perdent la jouissance de leurs héritages, labeur et semences qu’ils y font […] ».

 

Me Jean Symon et Eon (un temps, châtelain de Dol) ont tenté de remédier à l’inaction et aux malver-sations de Pierre Franchet et de Le Corvaisier. Munis de jugements de la Cour de Dol, donnés en présence du substitut du Procureur du Roi. « Ils se sont rendus aux marais pour faire visitation et procès verbal de l’état d’iceux, et pour obtenir que le Corvaisier eût à faire faire les réparations dues par l’Evêque, ou bien bailler deniers pour ce faire. Une autre fois, Eon se transporta sur les lieux où restaient à faire les réparations dues par ledit seigneur pour en faire procès-verbal, et il fit bannir par deux dimanches à Dol et deux dimanches aux paroisses circonvoisines […] pour être fait bail en l’auditoire de la Cour de Dol. Y voulant procéder, il en fut empêché par Le Duc et autres […] ».

Eon porta plainte mais à l’issue de l’audience, « Eon et Simon furent assaillis, battus et offensés. Il fut donné à Eon plus de cent coups de bois nommé pistolet, de sorte qu’il en fut jeté et prosterné contre terre, et disait-on tout notoirement que c’était en haine que ledit Eon voulait faire contraindre le seigneur, ou les receveurs économes et jouissant dudit évêché, à faire faire les réparations ». Réparations onéreuses pour l’évêque.

 

Les assaillants étaient des « gens à lui inconnus, qu’on disait notoirement être de M. d’Espinay […] et de ses frères. Ils étaient en compagnie de Le Corvaisier et d’un nommé André Broisessin, fermier et receveur de mes dits sieurs d’Espinay ». L’agression eut lieu en présence des officiers de la Cour de Dol.

 

« Eon, derechef, pressa les réparations à la suite du jugement de la Cour de Dol. Il en a été refusé par Me Julien le Corvaisier, lieutenant dudit Dol, disant qu’il lui en avait été fait défense par M. le Sénéchal ; de quoi Eon fit appel mais voyant [les disfonctionnements de la justice], et que Franchet qui exerçait encore ladite châtellenie était appelant contre lui, il dut laisser l’état de châtelain et celui-ci fut remis entre les mains de la justice ».

 

Le procureur demandait la condamnation de Le Duc et Franchet, la mise en chantier des travaux de dénoiement, ainsi que la suspension du paiement des rentes et devoirs que les paroissiens devaient à l’évêque, tant qu’ils ne pourraient pas jouir des revenus de leurs terres.

 

« Quant audit Eon, faisant ses procédures et requêtes, qu’il soit déchargé de la châtellenie et qu’il soit dit qu’il en a dûment fait son devoir et [mérité] son salaire. Il demande intérêt et pour servir au procès comme de raison, qu’il soit fait commandement à M. Julien Iguet, greffier civil dudit Dol, lequel est saisi du procès et requêtes d’Eon, de les mettre vers M. le Sénéchal, et aux officiers de Dol, de bailler l’enquête des excès et maux sus indiqués, et procès verbal de ce qu’ils ont vu faire à ce […].

 

Requérant outre, lesdits Eon et paroissiens, eux, leurs solliciteurs et négociateurs, être mis en la sûreté et sauvegarde du Roi notre Sire, et baillés en garde aux dits sieurs d’Espinay, parce qu’ils doutent d’eux et de leurs gens, afin qu’ils puissent poursuivre leur bon droit et le tout faire venir en lumière de justice.

 

Pour les mêmes causes et raisons que ci-dessus, ledit Nogues a dit et maintenu, [vouloir] être dédommagé et intéressé à la valeur de 60 L. de rente et plus […]. « Signé Busnel, Boudet et Eon ».

 

 

Réponse de l’économe :

 

« Noble homme Georges le Duc […] ayant entendu ce qu’il a été dit et rapporté en certain écrit mis vers le greffe de Rennes sous les seings de Busnel, Boudet et Eon, au sujet de la réparation des bieds en ruine du marais de Dol […], même autres écrits de certains particuliers, ledit le Duc dit qu’à l’assi-gnation donnée par M. le Sénéchal de Rennes, M. d’Argentré, il aurait comparu en l’auditoire de Dol devant lui et suivant son ordonnance, baillé et mis vers le greffier son plaidoyer par écrit auquel il se réfèrera et supplie qu’il ne soit pris égard, au respect de lui, à l’écrit baillé au nom dudit Eon et paroissiens, écrit qu’on voit apparemment être fait par Eon, et tout à son avantage ».

 

Le Duc dénonçait les propos outranciers utilisés contre l’évêque de Dol « nommé par le Roi », et contre ses frères. « On leur ferait connaître en justice, et à ceux qui ont fait et signé ledit écrit, leur témérité ». L’économe terminait en assurant « qu’il n’a institué, ni fait instituer châtelain, ni autres officiers audit Dol, et ne s’est entretenu que de faire recueillir le revenu en manière accoutumée, suivant la charge [qui lui était] baillée. Ceux qui voudront mettre en avant qu’il y ait commis abus et malversations, est prêt à répondre ».

 

 

Supplique des paroissiens de St Broladre :

 

« Disent les paroissiens de St Broladre que chacun, en droit sur sa terre, doit curer les douves et essais, et réparer les chemins ; la  plupart  de  la paroisse est au Terrain* et de temps immémorial n’ont été requis de  faire autres réparations […]. « Signé P.Huart et G. Buzart ».

 

* Terrain : Les terres situées sur le plateau, en arrière pays, hors des marais.

 

 

Déclaration des paroissiens de l’Abbaye-près-Dol :

 

« Comme procureur des manants et habitants de L’Abbaye près Dol, vu ce jour l’ordonnance de M. le Sénéchal de Rennes » disant que les paroisses voisines de Dol doivent comparaître devant lui, pour donner leurs avis, « je déclare que le corps politique de la paroisse de L’Abbaye près Dol, […] n’a aucun intérêt aux marais : son territoire est séparé du marais et non sujet à sa réparation […].

Ai laissé et signé la présente déclaration au greffe le mardi 10e jour de septembre 1560. « Signé Bouestard ».

 

 

Déclaration des paroissiens de Roz-Landrieux :

 

« Du Han, procureur des paroissiens de Roslandrieux et de Colas Ory et de Julien Fauton, trésoriers d’icelle, a dit et déclaré suivant son pouvoir que les paroissiens ne prétendent aucun intérêt aux réparations des bieds et essais des marais de Dol et qu’ils ne sont aucunement sujets à ces réparations parce que la paroisse n’est pas située es* dits marais. [Elle] est située au Terrain et au cas où il y aurait des personnes qui le voudraient soutenir, vers eux défendre, et sauf à s’adresser vers des particuliers, demeurant en la paroisse, qui sont à ce titre contribuables, par raison des terres que lesdits particuliers tiennent es dits marais hors la paroisse. « Signé René du Han ».

 

 

Déclaration de Jean Gicquel, sieur de Launay :

 

« Jean Gicquel, obéissant à l’appointement fait par messire Bertrand d’Argentré […] a comparu le 10e jour de septembre, l’an 1560, en l’auditoire de Rennes. Ledit Gicquel a répété ce qu’il  a dit, et mis vers M. le commissaire, sous son seing […], le suppliant de vaquer à sa dite commission par bonnes informations, enseignements et papiers » afin que le marais retrouve son bon état des temps passés. « Signé J. Gicquel ».

 

 

Déclaration de Jehan Jacopin, procureur de René du Han, seigneur de la Mettrie du Han et de Launay :

 

« Quand ont été appelés les paroissiens de Roslandrieux, a comparu Me Jehan Jacopin, procureur de noble homme René du Han, seigneur de la Mettrie du Han et de Launay, lequel Launay a remontré à Monseigneur que par faute d’avoir été entretenu par l’Evêque de Dol et par son châtelain (à présent par Me Georges Le Duc, faisant et jouissant du droit dudit évêché en vertu de certaines lettres d’économat, et Pierre Franchet, se disant châtelain de Dol) […] le bied de Guyoul depuis le moulin de l’archevêque jusqu’à la mer, et un autre bied appelé le bied de Cardequin en la Bruyère, descendant au Guyoul près du pont du Vivier, ainsi qu’un autre bied appelé le bied et goutte de Roblin, passant au travers du Rosai et descendant au bied de Lislemer* qui descend au pont et gouffre de Blanc Essai, et un autre bied descendant au gouffre de Blanc Essai appelé le bied Jean, lesquels bieds sont tous gaisés et comblés par faute d’avoir été entretenus en due réparation par le seigneur Evêque et son châtelain.

 

Ledit du Han en a été intéressé à cause des métairies ci-après : la Mutelien, la Mongatelais, la Motte Rigaut, situées en la paroisse de Roslandrieux, pour chaque année, de la somme de 200 L., depuis six ans. Supplie mon dit sieur qu’il lui plaise par provision ordonner les réparations être faites, et qu’à cette fin, vous contraigniez le receveur du revenu de l’évêché de Dol, et ordonniez les deniers provenant dudit évêché être pris et levés pour faire les réparations ainsi qu’elles sont faites à l’accoutumée, et commettre quelque notable homme pour l’entretien [des bieds], et réserver au dit du Han son action vers qui il verra bon être des intérêts qu’il a eus par le passé. « Ainsi signé Jacopin ».

 

* Ici on cite le bied de Lislemer et le Bied Jean, alors que précédemment ils étaient confondus [?]

 

 

Déclaration de Franchet, sieur de l’Aumône :

 

« Ledit Franchet déclare qu’il a été, pendant l’espace de huit mois, châtelain de Dol, [période où il a fait] bien et dûment son devoir en la châtellenie, comme avoir fait curer bieds, gouttes et essais des eaux du marais descendant à la mer, avoir fait hausser et rhabiller les chemins, de sorte que lorsqu’il fut destitué de la charge de châtellenie, ils étaient en meilleure état qu’ils n’avaient été avant sa nomi-nation : les marais étaient auparavant en grande nécessité de réparations. [Pour preuve], les levées de grains, foins, fruits et autres choses ont été meilleures [en comparaison] des sept à huit ans précédents.

 

Laquelle déclaration Franchet dit être véritable et offre de faire preuve à suffire ; et quant à la réparation des bieds et essais, des terres, Franchet dit n’avoir à débattre de les réparer en la manière accoutumée. Fait sous mon seing à Rennes, le 10e jour de septembre 1560. « Signé Franchet ».

 

 

Déclaration de Busnel pour Jean Simon :

 

« Busnel, pour Jean Simon, remontre qu’[il y a plus de] dix ans, Simon avait plusieurs maisons et héritages situés aux marais de Dol, es paroisses de Mont Dol et Cherrueix, qui étaient alors en bon état, de revenu et de valeur : estimation de 100 L de revenu par an. Depuis les six dernières années jusqu’à présent, ils ont été noyés et submergés, tant de la mer qui y est arrivée, que des eaux du terrain. Lui et ses gens ont convenu d’abandonner les dites terres et maisons, ne pouvant jouir des labeurs, fruits, revenus et levées d’iceux, à raison de quoi Simon est intéressé de ladite somme prédite, pendant six années.

 

En raison des eaux, les pommiers et arbres, tant portant fruit que bois, étant aux dits héritages, sont morts et séchés. C’est l’eau de mer, entre autres, qui les a fait mourir : estimation de 300 écus d’or. Ainsi, Simon est intéressé en la valeur de 100 écus pour ses maisons et granges qui sont tombées en partie par terre en raison des eaux qui n’ont [pu] s’évacuer à la mer par le gouffre du Bec à l’Asne qui était tenu clos et gaisé et ce, par faute de Franchet et autres châtelains prédits qui n’ont fait curer ni dégaiser le gouffre, ni le cours de la Banche […]. Pourquoi Simon requiert avoir récompense des sommes prédites […] qui seront prises et levées sur les deniers du temporel de Dol (à présent saisi en la main du Roi). »

 

Simon évoquait « les procès criminellement intentés » entre lui et Franchet, « touchant ce que devant, et autres malversations faites en sa dite charge, et attendait que le sieur de Dol soit condamné à mettre les choses en état es marais en ce qu’il est tenu ». Simon s’engageait à faire la part du travail qui lui revenait. « Ledit Simon requérant outre tous dépens, mises et intérêts, tant d’instance que hors d’icelle, […] que  justice lui être faite. « Signé J. Simon ».

 

 

Déclaration des paroissiens de Hirel :

 

Julien Delourme, procureur des paroissiens de Hirel, en réponse aux menaces de Le Duc, à l’encontre de ceux qui l’avaient insulté, affirmait qu’aucun de ses dires n’était injurieux, à l’égard de qui que ce soit. « Delourme n’ayant entendu reporter ni donner aucune injure ni préjudice, ainsi requiert le droit des paroissiens être gardé et observé […]. Protestant d’avoir recouvrance de tous leurs dommages et intérêts, lorsqu’ils verront l’avoir à faire, dont font réservation. « Signé J. Delourme ».

 

 

Ajournement jusqu’au jeudi 19 septembre :

 

« Finalement, les parties ouïes, [nous leur aurions donné] avant mercredi prochain, pendant lequel temps elles communiqueront et fourniront des contredits si bon leur semble […], pour au second jeudi, à pareille heure, comparoir devant nous, au présent auditoire, pour ouïr et recevoir l’appointement tel que sera par nous ordonné, soit provisionnel ou autrement ainsi qu’il sera par nous vu appartenir ».

 

 

Auditoire de Rennes, le 19 septembre :

 

Avenant le jeudi 19 […] aurions fait évoquer lesdites parties, à laquelle évocation auraient comparu Boudet pour les trésoriers et paroissiens de Notre Dame de Dol, Mont Dol, Cherrueix, le Vivier et Hirel, et aussi procureur d’Eon ; Me Guillaume Nogues ; Georges le Duc […] ; Franchet, […] ; Me René Even, procureur des paroissiens de Roslandrieux ; Bouestard, pour les habitants de l’Abbaye de Dol ; Huart, pour ceux de St Broladre ; Me Jean Jacopin, procureur du sieur de Launay du Han ; Simon présent en personne avec Boudet son procureur ; Me Jean Gicquel en privé nom et procureur de Delle Françoise Tournemine, dame de la Corbonnais, et chacun.

 

Lesquelles parties ouïes et interrogées après avoir pris communication des exploits respectivement produits, et fourni leur production, et déclaré ne vouloir autre communication, prendre et fournir outre ce que précédemment ils auraient produit devers notre adjoint, nous leur avons donné et continué l’assignation au lendemain, 20 dudit mois, 7 heures du matin, pour ouïr droit.

 

 

Auditoire de Rennes, le 20 septembre :

 

Après avoir enregistré le nom des présents (les mêmes que la veille) le commissaire nota l’absence des paroissiens de l’Abbaye-près-Dol, St Broladre, La Fresnais et Lislemer qui n’avaient envoyé personne pour les défendre. « Les aurions jugés défaillants […], et après […] aurions fait lire et prononcer l’appointement par nous arrêté en ce que dessus, et duquel la teneur suit ».

 

 

 

 

L’ordonnance de M. d’Argentré

 

Nous avons ordonné et ordonnons que, tant le sieur Evêque qu’autres habitants et possesseurs des terres situées aux marais de Dol, feront diligence au premier temps qu’être pourra, de recouvrer artisans, niveleurs et ingénieurs à telles choses, pour donner ordre et trouver le moyen de tirer les eaux nuisantes aux marais, en sorte que ces terres, fructueuses et fertiles, ne soient submergées, ou bien le moins endommagées qu’être pourra.

 

Et cependant, et par manière de provision, après avoir, au long, vu et visité ce qui nous a été montré par le procureur du Roi et l’économe du temporel de l’évêché, du châtelain, les remontrances et avertissements des paroisses intéressées, de Simon et autres particuliers […] et vu les informations par nous faites sur les nécessités des réparations, et à qui elles appartiennent.

 

Nous avons ordonné que sur les deniers provenant du temporel de l’évêché de Dol, l’économe […] sera tenu et l’avons condamné à curer, nettoyer et repurger le cours principal et ancien du Guyoul, depuis le moulin de l’archevêque jusqu’au pont du Vivier. Laquelle réparation, l’économe à présent, puis les Evêques, pour le temps [futur], seront tenus de continuer et entretenir par eux et leurs châtelains, à leurs frais et diligences, deux fois l’an, savoir aux mois de mai et de septembre, avec les ponts de Chanteloup et de la Bégaudière, […] et outre curer ledit bied de la vase y étant présente, le recreusant  de 2 ou 3 pieds et ainsi l’entretenir à l’avenir depuis la maison du nommé Jean Cruche jusqu’au pont du Vivier, […] et de là en avant, jusqu’à la maison sise sur le rivage appelée les Ballets. L’économe et l’Evêque seront tenus de purger le bied à leurs frais et diligence, tant de fond que de rivage, icelui préalablement élargi de 2 pieds de chaque côté et foncé de 4 pieds, et que ce soit jusqu’à la plate forme et pierre de taille sur laquelle est le portage et écluse du Bec à l’Asne, et 1 pied ou 2 en dessous, en sorte que l’eau du canal de la Banche et [celle] du grand bied puissent s’évacuer [grâce à] leur poids et pente.

 

La chaussée depuis le pont du Vivier jusqu’à la chapelle de la Mettrie Taillefer et Bied Neuf  sera réparée, regarnie et entretenue par les économes et successeurs Evêques, comme aussi le sera le pont Lechard, tant de bois que de chaussée, 30 pieds de chaque côté du pont, lequel sera haussé et taluté dûment pour résister à l’eau, et l’orée du pont sera refaite et réparée par les possesseurs ayant terres adjacentes, à plus égale contribution qu’être pourra. En outre, sera mis une porte au pont Lechard, entretenue aux frais communs de l’Evêque et des habitants, pour empêcher que l’eau de la mer lorsqu’elle échappe au Bec à l’Asne ne puisse passer outre et endommager les terres du Marais.

 

Pour le bied de La Banche, depuis son commencement jusqu’à la porte et écluse du Bec à l’Asne, même ladite écluse, huis, et ce qui en dépend, nous avons ordonné qu’il sera dégaisé, réparé et désormais entretenu et élargi de 30 pieds au devant de ladite écluse, aux frais, dépens et diligence des paroissiens de Notre Dame de Dol, Mont Dol, Cherrueix et Baguer Pican, possesseurs des terres adjacentes, chacun autant qu’il possède de terres, tant de fond que de rivage, en sorte que l’eau se contienne en sûreté dans le canal sans pouvoir se répandre sur les terres, grands chemins, ni voies du marais, comme aussi seront tous les possesseurs et tenant terres adjacentes de Pont Labat en l’endroit du Guyoul, lesquels seront tenus de munir, garnir, réparer et repurger les rives et rivages du Guyoul en sorte que l’eau s’y contienne dûment.

 

Quant au Bied Jean, depuis le rocher de Roslandrieux jusqu’aux Grands marais, nous avons ordonné que les possesseurs des terres de Lislemer et La Fresnais seront tenus, comme au passé, entretenir, curer, repurger, garnir et munir, tant de fond que de rivage icelui, à raison d’une perche à entretenir pour chaque âcre de terre qu’ils possèdent es dites paroisses ; à laquelle contribution les paroissien, ledit Evêque ou autre, chacun au prorata et par mesurage qui s’en fera, dont il sera fait rôle [pour] que chacun entende ce qui lui incombera.

 

Depuis les Grands marais jusqu’au pont de Blanc Essai, les possesseurs desdits héritages, chacun en droit soi, entretiendront le canal, le purgeront et creuseront si besoin est, comme aussi généralement les habitants de Lislemer, Vilde de la Marine, La Fresnais, le côté du pont de Blanc Essai vers la ville de Dol.

 

Quant au bied de Cardequin tombant dans la Bruyère, la Goutte des Daniaux, la Goutte du Rosai, et généralement toutes autres gouttes, canaux, essais, douves anciennes du Marais, et chemins, voies et passages adjacents, nous avons ordonné que les possesseurs, chacun en droit soi, seront condamnés à les réparer, garder, et entretenir en continuelle diligence ; et ordonné être fait commandement à tous les possesseurs des terres, même audit Evêque, et chacun en droit soi, de vider tous les encombres qui se trouveraient empêcher le cours ancien des eaux, conduits et adresses d’iceux.

 

Pour le Pont sous le Verot, nous avons ordonné que les parties seront ouïes plus amplement.

 

Pour l’entretien […] du marais et l’évacuation des eaux, l’Evêque sera tenu de constituer et gager un châtelain, homme de bien, solvable et répondant, et duquel il répond. Lequel sera tenu de faire continuelles chevauchées par les marais pour entendre les défauts survenant et les plaintes des habitants, pour y donner son avis et promptes provisions, en telles diligences que le cas le requerra. Il fera faire clôture et ouverture des huis et portes du pont du Vivier et du Bec à l’Asne et ailleurs où il y en a, et défendre que d’autres s’avancent de les ouvrir, au dommage du marais, comme quelquefois il est arrivé par le passé. Il contraindra les particuliers, habitants et possesseurs des terres adjacentes, s’employer à la réfection et réparation des canaux, bieds et essais, chacun en son endroit, et à cette fin usera de corrections et contraintes modérées et civiles, telles que le cas le requerra […].

   Les habitants contribuables aux réfections seront tenus d’y comparoir […] sans épargner aucun, riche ou pauvre, lorsqu’ils y seront [appelés] par le châtelain au prône de grand messe et autrement […], sans remise et dissimulation […]. Ils feront journée entière en présence du châtelain, ou autre qu’il sera tenu de mettre pour les contrôles […]. Le châtelain pourra, par sergent, faire exécuter le défaillant de telle somme qui sera requise pour mettre un ouvrier en son lieu, et pour autant de jour que devait le défaillant. Idem pour son salaire, dont il fera loyal procès verbal, sans appliquer l’argent à son profit ou autrement dissimuler le défaut du défaillant. De tout quoi, le châtelain sera tenu de faire faire registre par son greffier qui sera exhibé et communiqué […] quand besoin sera, sans en tirer à son particulier profit aucune chose, sur peine de quadruple et de peine extraordinaire de concussion. »

 

Pour les sommes supérieures à 100 sols, le châtelain sera tenu d’en faire requête à la justice du Roi, pour obtenir un décret, sauf urgence.

 

Il est défendu « à toutes personnes, de lever et ouvrir les portes du Bec à l’Asne et du pont du Vivier, sauf à ceux qui pour cela seront députés, […] soit sous couleur de pêcheries d’anguilles, ou pour toute autre occasion, sur peine d’être punis comme dépopulateurs du bien commun ; et à cette fin, seront mis ferrures et cadenas dont les clefs seront baillées au châtelain ou à ses commis dont il répondra.

 

Si par négligence du châtelain, du sieur Evêque ou de particuliers, de promptement faire les réparations quand le cas le requerra, il arrivait inconvénient, perte ou dommage aux voisins, celui par la faute duquel il arrivera, sera tenu de dédommager et indemniser [la victime], soit par rabat des rentes qu’il devra pour ledit an, ou autrement, selon le prix et l’importance du dommage.

 

Au regard des préjudices arrivés par le passé aux particuliers par faute de ce que dessus, nous avons réservé leurs actions en l’encontre de qui ils verront appartenir ; duquel appointement Le Duc, par ledit Guilleren, son procureur, s’est porté pour appelant, même Boudet, pour les paroissiens dont il a charge, s’est porté pour appelant dudit appointement, d’autant qu’il fait contre eux.

 

Néanmoins, afin qu’il soit promptement vaqué à la réfection des marais, et après que les procureurs des paroisses et autres particuliers présents ont été d’accord qu’il doit être mis quelque personnage à l’état de châtelain […] durant l’absence de Franchet (même que Eon a requis en être déchargé), a été nommé Me Jean Gicquel, sieur de Launay, du consentement de Eon, Simon et paroissiens, à l’état et office de châtelain dudit Dol, et jusqu’à ce qu’autrement en soit ordonné par ci-après. Lequel a promis et juré s’en acquitter et faire son devoir parce que durant le temps qu’il sera en ladite charge, jouira des gages anciens appartenant aux châtelains et autres profits accoutumés, d’autant qu’il est à présent fort nécessaire de faire procéder, en diligence, aux réparations des Marais.

 

A été ordonné qu’il sera par le receveur du temporel de l’Evêché […], immédiatement après la signification de la présente, délivré entre les mains de Gicquel la somme de 100 livres pour être mise et employée aux manouvriers qui seront  par lui, mis aux réparations du marais.

 

Gicquel sera tenu de rendre compte de cette somme et lui enjoint d’y faire vaquer en toute diligence ; et sera ledit receveur contraint d’avancer la somme à Gicquel par toutes voies de justice.

          

Fait à Rennes le 20e jour de septembre 1560, « Signé d’Argentré et Robinault ».

 

 

_________________________

[1] Charles d’Espinay fut nommé évêque de Dol le 29 mai 1560. « Pourtant, il n’eut aucun empressement pour rejoindre sa cathédrale. Finalement, il abandonna tout de même la poésie et d’autres occupations, pour se consacrer à ses devoirs épiscopaux. Le 4 février 1566, le chapitre de Dol qui l’attendait depuis sept ans, reçut enfin son évêque avec le cérémonial accoutumé. » P. Amiot ; Dol de Bretagne d’hier à aujourd’hui, tome III.

[2] Fabriqueur : membre de la fabrique (L’ensemble des clercs et des laïcs chargés de l’administration des fonds et revenus affectés à la construction, à l’entretien d’une église).

[3] Pendant la Révolution, les paroisses de N-D de Dol, l’Abbaye-près-Dol et Carfantain fusionnèrent pour donner naissance à la commune de Dol.

[4] Le bied de Lislemer est le bied Jean.

[5] Une perche contient 24 pieds, et mesure environ 7,80 m.

 

 

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